Babylon Berlin (Arne Jysch)


Arne Jysch. – Babylon Berlin. – Grenoble : Glénat, 2019. – 214 pages.

 


Bande dessinée

 

 


Résumé :

 

Berlin. Dans les années 1920, alors que l’Allemagne connaît de graves difficultés économiques et politiques, la naissance de la République de Weimar se fait au rythme de la corruption, du trafic et du scandale. À la suite d’un malencontreux homicide involontaire dans une période où le pays connaît des changements radicaux, l’inspecteur Gereon Rath est muté de Cologne à Berlin. Il se heurte alors à une enquête criminelle liée aux cercles de la nuit. En fréquentant la vie nocturne berlinoise, Roth va vite se rendre compte qu’ici, on ne peut faire confiance à personne. Pas même la police.

 

 

Commentaires :

 

Belle découverte que cette adaptation en images par Arne Jysch de la première des six enquêtes du commissaire Rath, le roman « Le poisson mouilléDer nasse Fisch » de Volker Kutscher, Babylon Berlin de Arne Jysch sur lequel j’avais publié un avis de lecture en novembre 2023. Avec un titre bien choisi, la ville de Berlin de la fin des années 1920 associée à la Babylone antique, symbole de la déchéance et de la perversion dans la jeune République de Weimar.

 

Cette version graphique en noir et blanc « avec ses nuances d'aquarelle granuleuses » du roman de Kutscher traduit bien l’atmosphère tendue des quartiers malfamés de la cité et du contexte sociopolitique corrupteur d’une Allemagne de l’entre-deux-guerres, au bord du précipice nazi, comme le mentionne Arne Jysch dans une conversation publiée sur le site web de Mystery Tribune :

 

« L'éditeur et moi avons décidé de trouver un style en noir et blanc. Au début, c'était un choix économique d'illustrer en noir et blanc. Mais lorsque j'ai commencé à chercher le style de dessin approprié, j'ai découvert qu'il était beaucoup plus facile de plonger le lecteur actuel dans le passé en utilisant l'atmosphère des œuvres d'art, des films et des photographies en noir et blanc contemporains des années 1920. »

 

Ce dernier qui a consacré six années à la production de cette BD a découpé le récit dans lequel alternent des scènes d’enquête et d’action en quatre parties :

 

1.    Le Mort du Landwehrkanal (le point de départ de l’enquête)

2.    Inspection A (le transfert de Gereon Rath à la section des affaires criminelles)

3.    Toute la vérité (la découverte du policier corrompu)

4.    Le Plan (le piège imaginé pour coincer le traître)

 

Pour se plonger dans les années folles, l’auteur a consulté un certain nombre de publications dont il fournit une liste abrégée en page liminaire. Ces albums illustrés et les ouvrages sur la danse, les restaurants, le graphisme et la publicité de l’époque, la politique, la mode et les services de police ont permis de mettre en valeur les lieux, les véhicules, la circulation, les références architecturales, les enseignes commerciales, les costumes, la représentation des piétons, les scènes plus intimes... À preuve, l’attrayante couverture de première inspirée d’une photographie des années 1920 avec en fond de scène le « Château Rouge », le siège de la Préfecture de police et sa « façade de deux cent mètres sur l’Alexanderstrasse, […] l’une des plus grosses constructions de Berlin. » Et, au premier plan, un Gereon Rath sosie de l’acteur américain Humphrey Bogart !


Arne Jysch a signé une mise en scène d’inspiration cinématographique offrant au lecteur différents angles de vue : plongée, contre-plongée, gros plans, plans panoramiques, jeux d’ombres et de lumières…

 

Son narrateur protagoniste, à la limite de la rectitude, raconte son histoire dans des phylactères rectangulaires aux textes rédigés à l’aide de caractères de machine à écrire, les distinguant ainsi des paroles des nombreux personnages qu’il côtoie.

 

Quelques notes en bas de page permettent de décoder certaines réalités ou expressions allemandes. Les scènes d’action sont très réalistes, quelques planches sans dialogues fort éloquentes comme dans cet exemple :

 

 

Arne Jysch s’est assuré que le scénarimage qu’il avait imaginé restait fidèle à la vision de l'inventeur de l'original en lui envoyant plusieurs brouillons :

 

« Chaque fois que je n'étais pas sûr de l'intention d'une certaine scène ou de la motivation d'un personnage, par exemple, je pouvais lui demander. »

 

« … j'ai pu améliorer certaines des scènes déjà passionnantes du roman. C'était amusant d'étoffer le jeu des acteurs et les dialogues des personnages sans avoir à se soucier de l'intrigue, car l'intrigue était si bien conçue dans l'original de Kutscher. »

 

Pour avoir lu la version romanesque, on peut que la transposition graphique est une réussite.

 

Arne Jysch est originaire de Brême (Allemagne). Il a étudié la communication visuelle et l’animation à Hambourg et à Potsdam. Il a produit en 2004 un court-métrage multiprimé, Der Beste. En 2012, sa première bande dessinée, Wave and Smile, l’histoire d’un soldat allemand en Afghanistan est publiée. Il vit à Berlin avec sa famille et travaille en tant que scénariste, illustrateur et conférencier à l’École du cinéma de Babelsberg, à Potsdam. 

 

Merci aux éditions Glénat pour le service de presse.

 

Au Québec, vous pouvez commander votre exemplaire sur le site leslibraires.ca et le récupérer auprès de votre librairie indépendante.

 

 

Originalité/Choix du sujet : *****

Qualité graphique et littéraire : *****

Intrigue : *****

Psychologie des personnages : *****

Intérêt/Émotion ressentie : *****

Appréciation générale : *****


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