André
Duchesne. – La traversée du Colbert – De
Gaulle au Québec en juillet 1967. – Montréal : Boréal, 2017. 318
pages.
« quasi Thriller
historique »
Résumé : Le 24 juillet 1967, Charles de Gaulle, président de la
France en voyage officiel, invité des gouvernements de Québec et d’Ottawa, a
marqué à jamais l’histoire en prononçant, au balcon de l’hôtel de ville de
Montréal, quatre mots – « Vive le Québec libre ! » - dont l’écho a
traversé le temps.
À l’occasion
du cinquantième anniversaire de cet événement singulier, avec l’avantage du
recul, à la lumière d’entrevues avec les témoins de l’époque et d’informations
puisées dans des fonds d’archives tant au Canada qu’en Europe, André Duchesne
nous raconte le voyage du Colbert, le
croiseur à bord duquel Charles de Gaulle a remonté le Saint-Laurent pour
débarquer à Québec plutôt qu’à Ottawa, comme l’aurait voulu le protocole. Il
reconstitue pour nous le fil des événements, depuis le ballet diplomatique entourant
les préparatifs du voyage, où le Québec cherche à jouer sur la scène
internationale un rôle tout nouveau pour lui, jusqu’aux réactions, à Montréal,
à Québec, à Ottawa, à Paris et dans le monde entier, qu’a provoquées cet appel
fatidique.
Il
examine en même temps quelques questions qui n’ont jamais été résolues sur cet
événement pourtant si fameux : qui a eu l’idée de faire venir de Gaulle
par bateau plutôt que par avion ? L’allocution au balcon était-elle inscrite au
programme de la journée ou a-t-elle été le fruit d’une inspiration subite ? Que
savait le président de la situation au Québec ?
Grâce
à une recherche originale et minutieuse, grâce à ses talents de raconteur,
André Duchesne nous donne l’occasion de revivre ces heures qui, comme tous les
moments-clés de l’histoire, ne cessent de nous fasciner et de nous révéler
leurs secrets.
Commentaires : Voilà une enquête historique qui devait être faite
afin de nous décrire dans le détail et de présenter l’envers du décor de cette
visite mémorable qui a marqué l’histoire contemporaine du Québec. À l’époque du
« Maître chez nous » du Parti libéral du Québec de Jean Lesage et
d’ « Égalité ou indépendance » de l’Union nationale de Daniel
Johnson.
Pour
la première fois, les documents d’archives nous révèlent des informations
encore jamais publiées. Idem pour les entretiens et la consultation de la
correspondance d’un grand nombre de témoins de l’époque, tant québécois,
canadiens que français. Toutes les sources écrites et visuelles utilisées par
André Duchesne permettent de décrire, sans parti pris, les événements, les
réactions politiques à froid et à posteriori ainsi que celles des médias avant,
pendant et après le séjour au Québec du célèbre général. L’ouvrage se divise
d’ailleurs en trois parties : la grande bataille diplomatique, en
territoire canadien et gérer crise. Quelques trop rares photos accompagnent un
texte qui se lit presque comme un « thriller » avec ses
rebondissements. Quant aux extraits de discours, de communiqués, de lettres,
d’articles de journaux, ils nous plongent dans l’ambiance du moment. Pendant
que se tenait, à Montréal, l’exposition universelle et que le Canada célébrait
le centenaire du Dominion.
La traversée du Colbert est un ouvrage rigoureux incontournable à se procurer
et à lire absolument afin de se faire une meilleure idée du déroulement de ces
journées historiques du 24 au 26 juillet 1967 parfois décrites en termes
réducteurs d’incident ou d’accident diplomatique.
Je
dois avouer que André Duchesne a ravivé d’heureux souvenirs, comme celui
d’avoir vu, à l’angle de la Canardière et de la 10e rue où je
demeurais, à quelques mètres seulement, le général et le premier ministre
Johnson dans leur décapotable en route vers la basilique
Sainte-Anne-de-Beaupré. Peut-être m’avait-il salué. Et évidemment celui de la
diffusion en direct par la Société Radio-Canada du célèbre cri lancé depuis le
balcon devenu célèbre : « Vive
le Québec libre ! ».
Après
avoir lu La traversée du Colbert, le
lecteur comprend mieux les enjeux politiques du moment ainsi que les
motivations progressistes du gouvernement du Québec (qui se tenait debout face
à celui d’Ottawa) et du Président de la République française dans cette
aventure en Amérique française.
Ce que j’ai aimé : Les informations nouvelles sur cet événement, dont
entre autres certaines conversations « intimes » et les commentaires
de politiciens qui, quelques années plus tard, allaient jouer un rôle important
dans l’évolution politique du Québec : René Lévesque, Robert Bourassa, Pierre
Bourgault…
Et
ce commentaire du général, se refusant de féliciter le Canada pour le
centenaire de la « Confédération », en référence à l’abandon par la
France, en 1763, de la Nouvelle-France : « Nous n’avons à féliciter ni les Canadiens ni nous-mêmes de la création
d’un « État » fondé sur notre défaite d’autrefois et sur
l’intégration d’une partie du peuple français dans un ensemble britannique. Au
demeurant, cet ensemble est devenu précaire. »
Ce que je n’ai pas aimé : -
Cote
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