Marie-Eve Mathieu. – Le petit fou. – Boucherville : Éditions de Mortagne, 2024. – 331
pages.
Thriller
Résumé :
Au dernier souffle du printemps, une jeune
femme disparaît à Montréal. Des semaines plus tard, elle est retrouvée morte, à
des kilomètres de chez elle, ses vêtements soigneusement pliés près de son
corps. Consultée par son ami détective pour l’assister dans son enquête, Clara
Robinson, psychologue judiciaire aux pratiques marginales, a la certitude que
le démon responsable de ce crime odieux n’a pas assouvi complètement son
fantasme.
Le futur lui donne raison lorsqu’un fermier
tombe sur un deuxième cadavre, abandonné dans le même secteur. Étrangement, les
victimes sont découvertes dans une forêt où, vingt-huit ans plus tôt, trois
jeunes se sont volatilisés sans laisser de traces.
Dans la région, il existe une légende : celle
d’un grand fou claudiquant dans les bois, assoiffé de vengeance. Serait-il
l’auteur de ces meurtres sordides ? Dans l’ombre de ce dernier se cache le
petit fou, terrifié par ce que pourrait être la vérité. Et si le terrible
secret qu’il porte en lui-même pouvait tout expliquer ?
Commentaires :
Le petit fou, le deuxième roman
de Marie-Eve Matthieu, est un thriller policier qui sort de l’ordinaire. Cette
intrigue repose évidemment sur une série d’assassinats, de nombreuses victimes,
des enquêteurs à la recherche du ou des meurtriers, et une résolution des
crimes, les éléments classiques d’un roman policier. Toutefois, l’auteure a
choisi de plonger efficacement le lecteur dans un univers oscillant entre
réalisme et parapsychisme, ce qui en fait une variante originale du genre.
Clara Robinson, qui a rejoint l’équipe de
police pour capturer un « démon méthodique dans son délire fantasmagorique »,
est un personnage atypique. Cette psychologue judiciaire et analyste du
comportement a une connaissance profonde des meurtriers, comme en témoigne son
passé traumatisant : « Mon père a tué ma mère quand j’avais dix ans ».
Elle possède un don unique pour détecter les odeurs de la mort et de son
auteur. Voici un passage qui illustre bien cette faculté qui lui permet de
ressentir profondément les choses et de percevoir des détails qui échappent aux
autres :
« Clara tressaille. Le tourbillon s'agite de nouveau
dans sa tête et se disperse dans son corps. Comme une fumée calamiteuse,
l'empreinte du démon est partout. Elle glisse sur le bardeau noir écaillé,
tombe contre le bois grugé de la façade, enfourche les onoclées sensibles,
papillonne sur le sumac grimpant, serpente autour des racines et des feuilles
mortes avant de se dissiper au loin, entre le compost naturel et les débris
ligneux. »
Ce personnage, expert en détection des traits
psychologiques des individus pour en dresser un portrait, me fait penser à Eve
Garance, une portraitiste hors pair qui maîtrise des méthodes d’analyse
fascinantes qui, dans une télésérie québécoise, est capable de « lire » les gens.
Marie-Eve Mathieu, qui s’est entre autres
documentée auprès d’un ami enquêteur, partage ainsi avec les lecteurs les
caractéristiques du criminel soupçonné par Clara Robinson :
« Alors, on cherche un homme blanc, caucasien
et qui parle français, car il est reconnu qu'un homme chasse presque uniquement
dans sa lignée ethnique et dans sa propre langue. J'estime qu'il a entre trente
et cinquante ans.
[...]
Parce qu'il est trop
organisé pour être plus jeune. En général, le premier crime est plus impulsif,
guidé par un fantasme.
À cause de son jeune
âge, lorsque le tueur est un adolescent ou un jeune homme, il est hors de
contrôle. Le meurtre n'est pas planifié. La scène de crime est désordonnée et
dévoile plusieurs indices par manque de préparation. Il laisse donc de l'ADN et
des empreintes. S'il ne se fait pas prendre, il apprend de ses erreurs et
devient de plus en plus méticuleux. Encore là, cela dépend de sa personnalité.
Parfois, il arrive qu'il ne développe jamais aucun sens de l'organisation. Mais
dans ce cas-ci, je te confirme que oui. Tu vois [...], les vêtements bien placés, la mise en
scène... J'imagine un homme organisé dans ses meurtres, mais pas nécessairement
dans la vraie vie. Il cumule donc les petits boulots, qu'il ne garde pas très
longtemps. Je pense qu'il habite Montréal ou qu'il travaille dans les environs.
Il a besoin d'une voiture pour déplacer ses victimes jusqu'ici, alors s'il ne
réside pas à Montréal, il a une maison dans le secteur, ou même un chalet.
[...]
C'est un homme
charmeur, qui inspire la confiance [...]. Car il ne faut pas oublier que ce
sont souvent des hommes prétentieux, manipulateurs et qui se croient
invulnérables. La gent féminine n'y voit que du feu. Il a des traits de
personnalité narcissique, mais cela n'est pas toujours très évident lorsque la
relation est superficielle, comme un collègue de travail ou une connaissance
qu'on croise de temps en temps. Il accroche l'œil, simplement.
[...]
Généralement, on se
retrouve face à un homme qui a commis de petits délits dans le passé, comme des
cambriolages, des actes de fétichisme, du voyeurisme ou même de la pyromanie.
Il commence sa vie de
psychopathe en se défoulant sur des animaux ou sur d'autres enfants. Ensuite,
cela ne suffit plus.
La famille peut être
dysfonctionnelle : abus physiques, souvent psychologiques ou sexuels, au menu.
Mais pas toujours, étonnamment. Le père peut avoir été absent, abuseur ou
consommateur de drogue ou d'alcool, voire les deux, et si c'est le cas, il peut
avoir initié son enfant à ces substances très tôt, alors que la mère restait
complètement indifférente.
[...]
Ces hommes sont le
mal absolu. Ils ne connaissent pas le remords, se considèrent eux-mêmes comme
des victimes de la société et ressentent un besoin constant de combler un vide. »
[...]
« Les démons ont un côté voyeur, surtout en ce
qui concerne leurs méfaits. Notre homme se fatigue de travailler dans l’ombre.
Il a ressenti ce besoin de s’afficher. Tu sais, regarder des gens se démener
dans une enquête qui concerne sa propre victime peut procurer un sentiment de
puissance. »
Tout dans cette histoire de tueur en série,
qui a débuté 28 ans plus tôt, est basé sur des secrets — ceux de Clara et
de Pierre, l’enquêteur — et des indices qui se dévoilent au compte-gouttes au
fil du récit. Les retours dans le passé m’ont un peu dérouté, particulièrement
au début du livre, lorsqu’il n’est pas évident de situer les personnages. Et ce
n’est qu’à mi-parcours de lecture que j’ai pu finalement me laisser entraîner à
rechercher moi aussi le coupable de cette déferlante assassine.
L’alternance du type de narration, celle du petit fou, rédigée en
italique qui témoigne de son vécu, et celle du narrateur omniscient qui observe
l’action crée une dynamique qui nous incite à accélérer la lecture, de
rebondissement en rebondissement dans une histoire complexe.
En cours
d’enquête, on apprend comment faire la part entre des ossements d’êtres humains
ou d’animaux trouvés sur une scène de crime :
« Les
os des membres supérieurs sont minces et droits, et la macrostructure démontre
des os corticaux poreux, l'épaisseur de l'os cortical représentant un quart de
l'épaisseur du diamètre de l'os. Nous pourrions analyser l'intérieur pour
savoir s'il est spongieux ou non, mais à ce stade-ci, je ne crois pas que ce
soit nécessaire. »
Le
coupable recherché, « démon des
étoiles », étant un passionné d’astronomie, j’ai eu l’occasion d’en
savoir plus sur les astres qui forment la constellation de la Grande Ourse. Et sur Alpha
Ursae Minoris, « un
système d'étoiles triple. Alpha Aa est une supergéante rouge. Alpha Ab et Alpha
B tournent autour d’elle.
Les romans
policiers ne servent pas seulement à divertir, mais aussi à instruire.
* * * * *
Marie-Eve
Mathieu est une infirmière clinicienne de profession et une auteure dans l’âme.
L’écriture a toujours fait partie de sa vie, des bandes dessinées humoristiques
aux poèmes mélancoliques et aux récits d’aventures. Conjuguant les soins aux
patients et l’éducation de ses jeunes enfants, elle a écrit et publié en 2019
son premier roman, « À dos de corbeau ». À ce jour, elle continue d’imbriquer sa
passion d’écrire à sa carrière, lorsque les temps libres le lui permettent.
Je tiens à
remercier les éditions de Mortagne pour
l’envoi du service de presse.
Au Québec,
vous pouvez commander votre exemplaire du livre via la plateforme leslibraires.ca et le récupérer dans
une librairie indépendante.
Évaluation :
Pour
comprendre les critères pris en compte, il est possible de se référer au menu
du site [https://bit.ly/4gFMJHV],
qui met l’accent sur les aspects clés du
genre littéraire.
Intrigue et suspense
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Originalité :
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Personnages
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Ambiance
et contexte :
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Rythme
narratif :
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Cohérence
de l'intrigue :
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Style
d’écriture :
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Impact
émotionnel :
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Développement
de la thématique :
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Finale
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Évaluation globale :
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