Patrice Robitaille. – L’homme qui mangeait des livres. – Ottawa : Les éditions L’Interligne, 2010. – 261 pages.
Polar
Résumé :
Les frères
Callibaud auraient dû reprendre ensemble la maison d’édition familiale de
renommée internationale. Mais Christian, en quête de liberté, se brouille avec
Gérard et renonce à son destin pour se mettre au service de la concurrence, aux
Éditions Grimard. Piètre directeur de collection, il se résigne au rôle de
représentant commercial, écumant sans enthousiasme les salons du livre et les
librairies pour promouvoir des publications auxquelles il ne croit pas. Entre
l’ennui de ce travail et les radotages du concierge M. Régis, Christian trouve
son seul réconfort dans les bras de la douce Rima, sa bien-aimée.
Mais tout bascule le jour où un commando
assassine Gérard : Christian reprend la direction des Éditions Callibaud et
devient le père adoptif de Raphaël, son neveu en fauteuil roulant dont il
ignorait jusqu’alors l’existence! Devenu à son tour la cible des tueurs,
Christian voit sur lui et les siens la menace se resserrer comme un étau. Menée
par Breault et Boudreault, un duo de policiers loufoques accompagnés de leur
chien arthritique, l’enquête prend des allures de course contre la mort… Le
monde de l’édition peut être d’une rare cruauté! Mais Christian l’antihéros
devra s’y frotter pour sauver sa peau et l’avenir du patrimoine familial...
Commentaires :
De prime abord, intriguante couverture de première de ce roman très peu en lien avec la trame scénaristique de cette histoire invraisemblable.
En étalant
une galerie de personnages plus ou moins excentriques, Patrice Robitaille a
livré un polar insolite qui plonge le lecteur dans le monde merveilleux de
l’édition. À l’origine de la chaîne du livre qui aboutit dans les mains de
lectrices ou de lecteurs amoureux de littérature. Un ouvrage et un auteur que j’ai
d’ailleurs découverts dans une des grandes ventes de livres usagés de Bobliothèque
Gabrielle-Roy de Québec.
En
exploitant les thèmes de la rupture familiale, du regret des décisions prises,
du crime et du métier d’éditeur dans un monde de concurrence, L’homme qui mangeait des livres touve sa
justification dans sa finale qu’il faut absolument lire pour reconnaître l’imaginaire
créatif de l’auteur.
Une histoire
à la fois déroutante et fantaisiste – je qualifierais l’ouvrage de « fantaisie
romanesque » - composée d’une série d’épisodes explosifs dans des
séquences dignes d’un film aux effets spéciaux qui s’enchaînent dans un espace-temps
limité à quelques jours. Une « enquête » menée par deux policiers
loufoques, balourds, Breault et Boudreault, « le Pion » qui fume
comme une cheminée et « le Veau » qui ingurgite des litres de lait.
Tous deux accompagnés de Pastèque, leur « cabot arthritique », proches
parents d’un certain Bonneau imaginé une dizaine d’années plus tard par l’auteur
montréalais à succès Jean-Louis Blanchard. Jusqu’à la découverte de l’homme
mangeur de livres, une métaphore du Dieu-Éditeur prêt à tout pour éliminer la
concurrence. Un sujet d’actualité avec les mouvements actuels, particulièrement
en Europe, de concentration des empires éditoriaux.
J’ai noté au
passage certaines réflexions sur le métier d’éditeur : « Moi je rêve de lire des manuscrits, je rêve
de les publier ou de les foutre à la poubelle. Je rêve d'être un éditeur en
bonne et due forme. » (p. 125) ou « …
le fruit de l'édition se savoure textuellement, que le livre est bon au point
de vouloir le consommer ? Être habité par le livre, cela veut-il dire, en
substance, l'ingurgiter pour de bon, puisque plus rien ne nous sépare de
l'auteur ? »
Intéressante
aussi la réécriture au conditionnel de l’énigme qui fournit au lecteur une
explication sur le style rédactionnel imaginé par Patrice Robitaille pour rendre
hommage, en épilogue, à tous les passionnés du monde de l’édition. Avec en
finale un clin d’œil à Daniel Pennac : l’énoncé des « droits inaliénables de l’éditeur »,
à faire grincer des dents tout auteur en devenir :
Le droit de refuser
un manuscrit
Le droit d'imposer la
ponctuation
Le droit de vérifier
orthographe
Le droit de sabrer le
texte
Le droit de faire
réécrire
Le droit de faire
réviser
Le droit de choisir
Le droit de douter
Le droit d'y croire
toujours
Une lecture
amusante, sans prétention.
Originalité/Choix du sujet : ****
Qualité littéraire : ***
Intrigue : ***
Psychologie des
personnages : ***
Intérêt/Émotion
ressentie : ***
Appréciation générale
: ***
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