La vie est un roman (Guillaume Musso)


Guillaume Musso. – La vie est un roman. – Paris : Calmann-Lévy, 2020. – 302 pages.

 


Roman

 

 






Résumé :

 

« Un jour d’avril, ma fille de trois ans, Carrie, a disparu alors que nous jouions toutes les deux à cache-cache dans mon appartement de Brooklyn. »

 

Ainsi débute le récit de Flora Conway, romancière renommée à la discrétion légendaire. La disparition de Carrie n’a aucune explication. La porte et les fenêtres de l’appartement étaient closes, les caméras de ce vieil immeuble new-yorkais ne montrent pas d’intrusion. L’enquête de police n’a rien donné.

 

Au même moment, de l’autre côté de l’Atlantique, un écrivain au cœur broyé se terre dans une maison délabrée.

 

Lui seul détient la clé du mystère. Et Flora va le débusquer.

 

 

Commentaires :

 

Je ne suis pas un lecteur assidu de Musso. Le titre de cet opus a attiré ma curiosité. Après La vie secrète des écrivains, je me suis laissé emporter par cette autre fiction dans laquelle l’auteur bien/mal aimé nous entraîne : une réflexion sur l’écriture, le lien entre les personnages et le romancier. Jusqu’à s’interroger à savoir qui est le véritable créateur d’un roman. Sujet qui n’intéresse particulièrement en tant qu’auteur à ses premières armes.

 

À mon avis, le commentaire de l’éditeur n’est pas trompeur : « En trois actes et deux coups de théâtre, Guillaume Musso nous immerge dans une histoire étourdissante (j’aurais toutefois utilisé un qualificatif moins exagéré) qui puise sa force dans le pouvoir des livres et la rage de vivre de ses personnages. »

 

Une réflexion intéressante sur le métier d’écrivain, de sa relation avec son lectorat, sur l’influence des personnages dans l’élaboration de l’intrigue, sur la solution du problème auquel il les confronte. De nombreuses citations référencées d’écrivains qui ont les mêmes préoccupations. Des aller-retour entre la réalité et la fiction, un flirt avec le fantastique, introduisant des dialogues entre le Créateur et le Créé.

 

Au total, un scénario jusqu’à un certain point rocambolesque avec une finale inattendue. J’ai particulièrement apprécié le lien constant entre le vécu de l’auteur présumé et celui de ses personnages. Un imaginaire inspirant, moteur de la création littéraire.

 

« Un roman réussi, c’est d’abord un roman qui rend heureux celui qui le lit ». Et qui donne le goût de continuer à écrire.

 

 

Originalité/Choix du sujet :
*****
Qualité littéraire :
*****
Intrigue :
****
Psychologie des personnages :
*****
Intérêt/Émotion ressentie :
****
Appréciation générale :
****

Les Demoiselles de Havre-Aubert (Jean Lemieux)

Jean Lemieux. – Les Demoiselles de Havre-Aubert – Montréal : Québec Amérique, 2020. – 276 pages.

 


Polar

 

 






Résumé :

Un soir d'août, le gérant d’une boutique de prêt sur gages de Montréal est abattu d'une balle dans la tête. André Surprenant, sergent-détective aux crimes majeurs du SPVM, est appelé sur les lieux bien qu’il soit en vacances.

Pourquoi? La victime est née aux Îles-de-la-Madeleine et Surprenant s’apprête justement à s’y rendre avec sa famille pour jouir de quelques semaines de repos dans l'archipel où sa carrière d’enquêteur a pris son envol. Au grand dam de sa blonde Geneviève, il y est plongé dans une affaire complexe, où les cadavres s'accumulent.

Havre-Aubert, les buttes des Demoiselles, la Grave avec ses cafés, ses touristes et sa marina, deviennent bientôt le centre d’une toile d’influences qui s’étend jusqu’à New York, Niagara, Montréal et Puerto Plata. À moins qu’il ne s'agisse d’une histoire de famille? Surprenant, en short, chemise hawaïenne et sous son célèbre galurin, prend l’air salin et fait parler les gens.

 

 

Commentaires :

 

André Surprenant et Jean Lemieux récidivent. La sixième enquête enlevante de ce sergent-détective aux crimes majeurs du Service de police de la ville de Montréal (SPVM) qui nous transporte dans la communauté tissée serrée des Madelinots, au cœur du golfe Saint-Laurent.

 

Les polars de Jean Lemieux sont apaisants et procurent jusqu’à un certain point  une sensation de réconfort. L’intrigue est simple : quelques meurtres qui s’empilent, une quête de la vérité qui progresse lentement. Les indices s’accumulent et l’intuition proverbiale du héros permet de découvrir, dans une scène rappelant celles d’une Agatha Christi, le ou la coupable.

 

Tout au long du récit, le lecteur est enveloppé par les odeurs, les couleurs, la langue régionale, la gastronomie, les paysages à couper le souffle, le vent, la mer houleuse qui caractérisent cette extension maritime du territoire québécois. Ayant personnellement demeuré quelques jours sur le Chemin d’en Haut, à proximité de la Grave, à mi-chemin entre les résidences des différents protagonistes, j’ai été plongé au cœur de l’action.

Les Demoiselles de Havre-Aubert nous bercent au rythme des insulaires, dans un décor bucolique ou argent sale, drogue, assassinats sont l’apanage de malfrats bien campés en lien avec la diaspora madelino-montréalaise. Lemieux met aussi en scène les hostilités récurrentes entre les bleus (les policiers du SPVM) et les verts (ceux de la Sûreté du Québec). De même que les tensions internes au sein de la police nationale.

 

Un roman qui se lit avec intérêt et qui nous initie à la richesse du vocabulaire des Îles. Sans compter une énigme que seul l’esprit cartésien d’André Surprenant est en mesure de déchiffrer.

 

Encore une fois, Jean Lemieux nous titille avec une autre allusion au Front de libération du Québec (FLQ) en mentionnant, au tout début du roman, que son héros détient des informations inédites stockées sur une clé USB. Il faudra bien un jour que le chat sorte du sac pour peut-être mettre en lumière certains coins sombres de la crise d’octobre 1970.

 

 

Originalité/Choix du sujet :
*****
Qualité littéraire :
*****
Intrigue :
*****
Psychologie des personnages :
*****
Intérêt/Émotion ressentie :
*****
Appréciation générale :
*****

Le printemps des traîtres (Christian Giguère)

Christian Giguère. – Le printemps des traîtres. – Montréal : Héliotrope, 2020. – 244 pages.

 


Roman noir

 

 






Résumé :

Michaël a rencontré Dominique durant la fièvre du printemps 2012. Aujourd’hui, il est père d’une petite fille et réduit à vendre du fentanyl dans les secteurs pauvres de Longueuil. Un jour, il est approché par le Gang de l’Ouest. Billy McCallister, l’impétueux chef de clan, et Aidan, son écervelé de fils, ne lui inspirent pas confiance, mais Colm, un vieil Irlandais rompu aux arcanes de l’organisation, le convainc de s’enrôler. La paye est proportionnelle au risque, et Michaël sent que c’est sa dernière chance de sauver sa famille de la ruine.

Première mission : détourner un convoi de jeunes réfugiées que la Triade destine à la prostitution, puis alerter les médias sur les méfaits de l’organisation ennemie. Sauf que les McCallister ne sont pas les seuls à tirer les ficelles, et la mission a tôt fait de déraper. Michaël se retrouvera au cœur de la tempête, et Colm aura du mal à protéger sa recrue.

 

 

Commentaires :

 

Le printemps des traîtres est le deuxième roman noir de Christian Giguère. Cette fiction a pour thèmes des sujets de l’heure : corruption politique,  groupes mafieux, prostitution, délinquance, drogue, assassinats, immigration illégale, interventions de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) dans un espace-temps, la rive sud de Montréal post printemps érable. Un cocktail explosif propice à la traîtrise.

 

L’écriture de Christian Giguère est efficace : elle nous plonge dans l’atmosphère glauque de l’univers du personnage principal, Michaël, et de son protecteur, Colm, deux brigands  amoureux de littérature. L’utilisation du retour dans le temps permet de bien cadrer les tenants et aboutissants de cette sombre histoire. Le rythme du récit est plutôt modéré. De nombreux personnages secondaires émergent au gré de l’action. Le drame se construit progressivement au gré des chapitres entraînant le lecteur à espérer une heureuse conclusion.

 

Certaines répliques en anglais (irlandais) dans les dialogues m’ont quelque peu  frustré, mon niveau de maîtrise de la langue ne me permettant pas d’en bien comprendre le sens.

 

En conclusion, une thématique originale qui s’insère très bien dans l’objectif de cette collection qui, comme l’indique l’éditeur, vise à « tracer, livre après livre, une carte inédite du territoire québécois dans lequel le crime se fait arpenteur-géomètre ». La couronne sud de Montréal y a maintenant une place de choix.

 

Merci aux éditions Héliotrope pour le service de presse.

 

 

Originalité/Choix du sujet :
*****
Qualité littéraire :
*****
Intrigue :
****
Psychologie des personnages :
*****
Intérêt/Émotion ressentie :
****
Appréciation générale :
****

Les fantômes de Reykjavik (Arnaldur Indridason)


Arnaldur Indridason. – Les fantômes de Reykjavik. – Paris : Éditions Métailié, 2020. – 313 pages.

 



Polar

 






Résumé :

 

Danni a disparu, elle se droguait, ses grands-parents font appel à Konrad, un policier à la retraite. Une fillette retrouvée noyée dans le lac du centre de Reykjavik en 1947 hante les rêves d’une des amies de l’ex-policier.

Comment la police a-t-elle mené ces enquêtes ? À des années de distance les mêmes erreurs semblent se répéter. Konrad, solide, têtu, coléreux et rompu par son enfance auprès de son père à toutes les ruses des voyous, n’hésite pas à bousculer les conformismes. Il sait aussi écouter les fantômes.

 

 

Commentaires :

 

Sur la couverture de quatrième, l’éditeur affirme que, dans « Dans une construction particulièrement brillante, Indridason crée un suspense et des attentes sur des plans différents et surprenants. Il captive le lecteur et le tient en haleine avec brio. Il est ici question d’espoirs déçus et d’enfants que personne ne protège. » Et il a bien raison.

 

L’auteur islandais qui a publié à ce jour une vingtaine de romans traduits en français nous replonge dans l’univers d’un nouveau personnage dont il nous a fait faire connaissance  dans Ce que savait la nuit, le policier à la retraite Konrad à la recherche d’explications sur son passé. Intrigue bien ficelée, nombreux personnages qui s’insèrent pour alimenter de déroulement lent de l’action lente. Suspense efficace qui nous laisse deviner progressivement la solution de l’énigme exposée dès le premier chapitre.

 

Une histoire noire menée de main de maître avec de nombreux retours sur l’ordonnancement des événements dans une Islande sombre, fantomatique. Des sujets sensibles, la pédophilie, les abus sexuels et la violence conjugale traités de manière brillante dans le non-dit. Du grand Indridason dans une autre enquête efficace comme il sait en imaginer, avec un soupçon de fantastique qui ne nuit nullement à la crédibilité du récit.

 

Une lecture agréable, un texte intelligent, une traduction impeccable de Éric Boury. Si les amateurs regrettent la fin des aventures d’Erlendur Sveinsson, ils retrouvent la même signature dans celles de Konrad. Bien hâte de plonger dans la troisième enquête de personnage La Pierre du remords, avec comme thème « la honte, le désespoir et l’intensité des remords qui reviennent nous hanter. »

 

 

Originalité/Choix du sujet :
*****
Qualité littéraire :
*****
Intrigue :
*****
Psychologie des personnages :
*****
Intérêt/Émotion ressentie :
*****
Appréciation générale :
*****