Le mystère Henri Pick (David Foenkinos)


David Foenkinos. – Le mystère Henri Pick. – Paris : Gallimard, 2016. – 323 pages.



Roman







Résumé :

En Bretagne, un bibliothécaire décide de recueillir tous les livres refusés par les éditeurs. Ainsi, il reçoit toutes sortes de manuscrits. Parmi ceux-ci, une jeune éditrice découvre ce qu'elle estime être un chef-d’œuvre, écrit par un certain Henri Pick. Elle part à la recherche de l'écrivain et apprend qu'il est mort deux ans auparavant. Selon sa veuve, il n'a jamais lu un livre ni écrit autre chose que des listes de courses... Aurait-il eu une vie secrète ? Auréolé de ce mystère, le livre de Pick va devenir un grand succès et aura des conséquences étonnantes sur le monde littéraire.

Commentaires :

Ce roman qui raconte une supercherie littéraire, truffé d’humour, jette un regard cynique sur le milieu de l’édition, un univers aux préoccupations commerciales où l’enveloppe extérieure du produit et le vedettariat l’emportent souvent sur le contenu. Le récit est construit à la manière d’un polar créant chez le lecteur l’appétit de découvrir le fin fond de l’affaire dans la chute finale.

Pour qui connaît peu les dessous de la publication de livres dits « à succès », Le mystère Henri Pick dévoile des pratiques à la limite de l’honnêteté intellectuelle. Avec quelques clins d’œil sur l’actualité littéraire et la promotion d’un non-auteur dans l’une des plus prestigieuses émissions littéraires diffusées sur une chaîne française. Une fiction réalité qui m’a interpellé dans mes propres préoccupations éditoriales.

Bien écrit, ce roman à l’écriture fluide qui se lit facilement m’a rappelé un projet fou non réalisé que j’avais imaginé il y a déjà quelques années : réserver un stand dans un salon du livre avec en son centre une grande poubelle arborant un écriteau où on n’aurait pu y lire : « Déposez ici vos manuscrits rejetés, nous les publierons ». À une époque où mon premier projet de roman accumulait les refus d’édition.

Le mystère Henri Pick ne pouvait être écrit que par un auteur puisqu’il raconte le désir d'être reconnu et édité et l'angoisse d'être oublié de tout écrivain émergeant.

Inspirant.




Originalité/Choix du sujet :
*****
Qualité littéraire :
*****
Intrigue :
*****
Psychologie des personnages :
*****
Intérêt/Émotion ressentie :
*****
Appréciation générale :
*****

Un plan maudit (Marc Lebreton)


Marc Lebreton. – Un plan maudit. – MonBestSeller.com, 2020. – 329 pages.



Genre : Thriller







Résumé :

Un plan maudit est l’histoire de Paul Verneuil, un homme ordinaire, féru de course à pied, qui travaille dans l’administration pénitentiaire en qualité de conseiller d’insertion et de probation. Confronté à des troubles de mémoire, il consulte le Professeur Vignier, un neurochirurgien qui utilise l’hypnose à son insu, pour le persuader de se faire poser des implants dans le cerveau, l’équivalent d’un nanodisque dur contenant des données encyclopédiques. Paul y découvre une base de données implantée par erreur et destinée à une entreprise de corruption dénommée « l’Agence ». Sylvain Saintonge, le propriétaire de cette base et l’homme de main de « l’Agence », va essayer par tous les moyens de la récupérer. Une poursuite impitoyable s’engage entre les deux hommes.

Commentaires :

Un premier roman pour Marc Lebreton dans lequel on retrouve les intérêts de l’auteur pour la protection de l’environnement, la technologie et une de ses passions : la course à pied. Marathonien à ses heures, il partage ses appétences avec son personnage principal qui, d’entrée de jeu, doit fuir dans les sentiers boisés à quelques kilomètres de son propre terrain d’entraînement.  

Mi-thriller, mi-science-fiction, Un plan maudit repose sur une thématique originale qui nous tient en haleine de chapitre en chapitre malgré quelques invraisemblances. Le protagoniste et les personnages secondaires sont bien campés. Le style fluide. Le chapitre XXVI - Au fil du désir m’a semblé sans suites avec le reste de l’histoire. Quant à la finale, elle m’a quelque peu laissé sur ma faim, à moins que celle-ci soit annonciatrice d’une suite.

Une lecture agréable qui a conquis les lecteurs du site MonBestseller.com : le 12 juillet 2020, le roman se classait 2e sur 3700 ouvrages mis en ligne. Peut-être annonciateur qu’une maison d’édition devrait manifester son intérêt.

Un auteur sympathique à découvrir.


Originalité/Choix du sujet :
*****
Qualité littéraire :
****
Intrigue :
****
Psychologie des personnages :
****
Intérêt/Émotion ressentie :
****
Appréciation générale :
****

À la ligne – Feuillets d’usine (Joseph Ponthus)


Joseph Ponthus. – À la ligne – Feuillets d’usine. – Paris : La Table ronde, 2019. – 262 pages.



Premier roman







Résumé :

C'est l'histoire d'un ouvrier intérimaire qui embauche dans les conserveries de poissons et les abattoirs bretons. Jour après jour, il inventorie avec une infinie précision les gestes du travail à la ligne, le bruit, la fatigue, les rêves confisqués dans la répétition de rituels épuisants, la souffrance du corps. Ce qui le sauve, c'est qu'il a eu une autre vie. Il connaît les auteurs latins, il a vibré avec Dumas, il sait les poèmes d'Apollinaire et les chansons de Trenet. C'est sa victoire provisoire contre tout ce qui fait mal, tout ce qui aliène. Et, en allant à la ligne, on trouvera dans les blancs du texte la femme aimée, le bonheur dominical, le chien Pok Pok, l'odeur de la mer.

Par la magie d'une écriture tour à tour distanciée, coléreuse, drôle, fraternelle, la vie ouvrière devient une odyssée où Ulysse combat des carcasses de bœufs et des tonnes de boulots comme autant de cyclopes.


Commentaires :

À la ligne est le premier roman de Joseph Ponthus originaire de Reims. Wikipédia nous apprend que l’auteur a travaillé à la mairie de Nanterre comme éducateur spécialisé puis a suivi et aidé des jeunes en difficulté. En 2015, un mariage le conduit en Bretagne, à Lorient. Ne trouvant pas de travail dans la continuité de son activité en région parisienne, il s’inscrit dans une agence d’intérim. Cette société lui propose des postes successifs comme ouvrier. Tout d’abord dans une conserverie de poissons, où il passe de la ligne des poissons frais, à celle des poissons panés, puis à l’égouttage des tofus et enfin à la cuisson des bulots. Son emploi suivant est dans un abattoir.

Ce sont ses deux expériences d’ouvriers d’usine que Joseph Ponthus nous relate dans une autofiction coup de poing, un livre remarquable.

D’abord par son style littéraire, déroutant en début de lecture, mais tout à fait adapté à la thématique : à la ligne, sans points ni virgules. Un long poème, une ode aux ouvriers qui peinent au quotidien dans un travail à la chaîne dévalorisant, dévalorisé, travail ignoré des consommateurs qui profite du produit de leur labeur.

Et par les questions de société qu’il soulève.  Ambiance, odeurs, descriptions souvent déstabilisantes, réflexions de l’ « homme-machine » sur la monotonie des heures passées à l’usine, les cadences infernales, le travail déshumanisant, la surexploitation des ressources et des humains, l’épuisement physique, les courtes nuits de sommeil, les relations de travail malsaines, le ridicule de certaines tâches… l’apanage de ce roman social hors normes.

Une œuvre romanesque remarquable qui choque, qui dérange, qui révolte, qui laisse en bouche le goût des produits alimentaires usinés. Un livre que j’ai dévoré en quelques heures et qui mérite bien le Grand prix RTL-Lire, le Prix Régine-Deforges, le Prix Jean-Amila-Meckert, le Prix du premier roman par les lecteurs des bibliothèques de la Ville de Paris et le Prix Eugène-Dabit du roman populiste reçus au moment de la publication de cet avis de lecture.

Une de mes lectures coup de cœur 2020.


Originalité/Choix du sujet :
*****
Qualité littéraire :
*****
Intrigue :
*****
Psychologie des personnages :
*****
Intérêt/Émotion ressentie :
*****
Appréciation générale :
*****