L’affaire Delorme (Michel Viau et Grégoire Mabit)


Michel Viau et Grégoire Mabit. – L’affaire Delorme. – Montréal : Glénat Québec, 2019. – 154 pages.

 

 

Polar en bande dessinée

 

 

 

Résumé :

 

Un prêtre peut-il tuer son frère ?

 

À l'aube du 7 janvier 1922, des employés de la voirie de Montréal découvrent le corps de Raoul Delorme abandonné sur un terrain de Notre-Dame-de-Grâce. On lui a tiré six balles dans la tête.

 

Qui donc a abattu le jeune étudiant avant de déposer son cadavre loin de chez lui ?

 

Les soupçons se portent sur son frère aîné, Adélard, déshérité par leur père, mais gestionnaire de la fortune de Raoul. Autoritaire, excentrique, colérique et débauché, Adélard est aussi... prêtre catholique.

 

Le policier Georges Farah-Lajoie mène l'enquête la plus difficile de sa carrière. Il doit affronter la puissance du clergé catholique et supporter l'opprobre d'une société profondément religieuse...

 

 

Commentaires :

 

J’avais beaucoup aimé une BD plus récente que Michel Viau avait scénarisée – illustrée par Jocelyn Bonnier – qui traitait d’un sujet un peu similaire : « La non vengée – Le mystère Blanche Garneau » publiée en 2024.

 

En préparation d’un entretien dans le cadre de la série « Quelques nuances... d’auteur.e.s de polars » que j’anime à la librairie La Liberté de Québec, j’ai lu d’un trait « L’affaire Delorme », une des causes judiciaires les plus célèbres du Québec dont le déroulement est parsemé de rebondissements jusqu’en finale :

 

« Cette découverte macabre n’était que le prélude d’un feuilleton criminel qui allait passionner la population canadienne-française en ce début de XXe siècle, que certains ont qualifié de ‘’ procès du siècle ‘’ ».

 

Avec des dessins au trait en noir et blanc qui nous replongent à l’époque des faits relatés et des images inspirées de photos tirées de certains journaux, les auteurs nous font revivre dans les moindres détails et de semaine en semaine l’enquête du détective Farah-Lajoie, celle du coroner, l’enquête préliminaire et les trois procès de l’abbé Delorme. Les illustrations en page 3 et 103 en sont de beaux exemples :

 


Même la physionomie graphique du policier enquêteur ajoute à la crédibilité du déroulement du récit :

 


Il en est ainsi de nombreuses reproductions d’articles de faits divers qui en témoignent.

 

Au passage, le lecteur fait la connaissance du Dr Wilfrid Derome alors médecin légiste à la morgue de Montréal. Une occasion pour insérer dans l’enquête la balistique : « ... une nouvelle science que le docteur Derome a étudiée à Paris ! [...] il paraît que chaque arme à feu marque d’une façon unique les balles qui traversent leur canon. Il est alors possible de savoir si telle balle a été tirée par telle arme ! [...] C’était la première fois qu’une telle preuve était présentée en Amérique du Nord. »

 


Le même « Wilfrid Derome Expert en homicides » (Boréal, 2003) dont l’auteur de polars Jacques Côté a publié la biographie qui « fait du lecteur le témoin des procès les plus spectaculaires de l’époque auxquels Derome, devenu une véritable vedette, était invité en tant qu’expert ». Ouvrage dans lequel il est aussi question du « du scandale de l’abbé Delorme ».

À noter qu'en 1922, Geoges Farah-Lajoie chargé de l'enquête et qui a été traîné dans la boue, sa réputation salie pour faire accuser un prêtre de confession catholique alors qu'il était d'origine syrienne, a publié sa version de l'affaire Delorme.




La scène ci-dessous illustre bien l’attitude condescendante empreinte d’hypocrisie de la gent masculine de cette époque à l’égard des femmes jugées inaptes à être confrontées aux « relations immorales de l’accusé » réputé « coureur de jupons » :

 


J’ai souri en lisant cet extrait de dialogue, me rappelant le sujet du thriller « La femme de Montréal » de Pauline Vincent  dont l’action est campée 12 ans plus tard :

 

« ... je ne suis pas journaliste ! Mais je veux faire mes preuves ! Je veux montrer à la rédaction qu’une femme peut aussi écrire sur des affaires criminelles. »

 

Avec « L’affaire Delorme », j’ai découvert un pan de l’histoire judiciaire du Québec que je ne connaissais pas. La bande dessinée atteint ses objectifs à la fois de divertissement et de pédagogie dans un format accessible pour un lectorat amateur de polars.

 

* * * * *

 


Michel Viau qui vit à Sherbrooke est historien de la bande dessinée québécoise (« Les Années Croc », 2013; « BDQ. Histoire de la bande dessinée au Québec », 2014, réédité en 2021). Il a été directeur du secteur BD des éditions Les 400 coups et rédacteur en chef de Safarir. Il est le scénariste de « Blass : Le chat sur un toit brûlant » et de « La Non vengée : Le mystère Blanche Garneau » chez Glénat Québec. Il collabore au Cochaux Show (CFLX) à titre de chroniqueur BD.

 

Grégoire Mabit est un artiste visuel montréalais. Après un diplôme en audiovisuel à Paris, il poursuit des études en arts visuels et médiatiques à l’UQAM. Il fait ses débuts en bande dessinée en publiant des histoires courtes pour le collectif Front Froid et la revue Planches. En 2017, il signe une œuvre numérique intitulée « Relâche » pour le dispositif de la mosaïque multiécran à la Place des arts de Montréal. En 2018, suite à une résidence d'artiste dans le parc national de Gwaii Haanas (Colombie-Britannique), ses œuvres sont exposées au Haida Gwaii Museum. L'exposition comprend 16 planches de bande dessinée autobiographique sur l'exploration du parc.

 

Au Québec, vous pouvez commander votre exemplaire du livre via la plateforme leslibraires.ca et le récupérer dans une librairie indépendante.

 

 

Évaluation :

Pour comprendre les critères pris en compte, il est possible de se référer au menu du site [https://bit.ly/4gFMJHV], qui met l’accent sur les aspects clés du genre littéraire.

 

Évaluation globale :

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