Versant noir (Lison Lambert)


Lison Lambert. – Versant noir. – Paris : Hugo iMPACT, 2025. – 239 pages.

 

 

Thriller

 

 

 

Résumé :

 

 

Parfois, la montagne tue. Chaque année, en moyenne, cinq alpinistes perdent la vie durant l’ascension de l’Everest.

 

Alex, vingt-cinq ans, ancienne championne de saut à ski et Jef, son père, guide de haute-montagne aguerri ont suffisamment l’expérience des sommets pour le savoir. Même s’ils n’ont encore jamais gravi cette éminence que les Népalais nomment « la déesse qui touche le ciel ».

 

Quand ils acceptent l’invitation d’Aniruddha – un jeune sherpa qui vient de fonder la première agence d’expédition commerciale népalaise – et se joignent à la cordée vers le sommet, ils pensent pouvoir maîtriser les éléments.

 

Mais sur l’Everest, la zone de la mort n’est peut-être pas celle qu’ils redoutaient.

 

 

Commentaires :

 

« Versant noir », le premier roman de Lison Lambert, est un thriller au suspense entretenu par l’enchaînement de morts pas toujours accidentelles. Dans l’esprit de la collection dont il fait partie, il met en évidence la surenchère touristique de l’Everest, des impacts écologiques de l’omniprésence des alpinistes, des ambitions économiques du Népal et de l’exploitation des sherpas. Ces quelques extraits, commentaires de différents personnages mis en scène par l’auteure, sont éloquents :

 

« ... l'année dernière, on a ramassé plus de quinze tonnes de déchets humains entre les camps 1 et 2. »

 

« ... c'est la partie émergée de la décharge [...]. Les touristes ne redescendent pas leurs déchets et les sherpas ne sont pas assez nombreux pour s'en occuper en même temps qu'ils gèrent les expéditions. »


« ... c’est quand la logique capitaliste a débarqué qu'on a commencé à merder. La dernière idée en date est de défoncer le glacier de la Grave à la pelleteuse pour prolonger le téléphérique déjà existant et ainsi agrandir le domaine skiable qui sera principalement équipé d'une neige artificielle qui demande 4000 ml d'eau par hectare. »

« Une eau que l'on va chercher dans des retenues collinaires, artificielles elles aussi et qui, comme leur nom l'indique, ont été creusées dans la montagne. Ici, vous avez des lacs glaciaires qui vont finir par déborder à cause du réchauffement climatique et du potentiel sismique élevé de la région ... ».

« ... hormis remplir un peu plus les poches de l'État, cette augmentation de 4000 dollars [coût du permis d’escalade] aura un effet dissuasif sur des clients qui sont prêts à dépenser entre 41 000 et 1 600 000 dollars pour une expédition. Croyez bien que j'en doute. Vous le savez, le Népal est pauvre et l'Everest est la seule attraction du pays. Si l'on s'intéresse davantage aux chiffres, il faut savoir que le business du Toit du Monde rapporte en moyenne 5 millions de dollars par an à l'État. »

« La multiplication des vols en hélicoptères de ces dernières années avait rendu son job de yakman complètement obsolète. Dorénavant, les touristes préféraient se faire acheminer confortablement et rapidement vers le camp de base. Certains alpinistes continuaient de faire le trek de Lukla au camp de base mais confiaient leur matériel de grimpe et bidons d'approvisionnement aux hélicoptères qui déposaient cela en un clin d'œil aux équipes de sherpas déjà sur place. Les cordées n'avaient plus qu'à glisser dans leurs chaussons dès leur arrivée. »

 

Ceci dit, « Versant noir » est un très bon roman qui nous fait vivre le quotidien des alpinistes confrontés aux aléas de la température et aux risques d’être engloutis par une avalanche ou de chuter dans une crevasse. Les techniques de cordée démontrent à quel point Lison Lambert maîtrise son sujet dont le scénario repose sur des connaissances et une recherche approfondie.

 

Les descriptions des lieux et des ambiances sont très convaincantes :

 

« C'était le petit matin et les cimes alentours s'allumaient une à une au fur et à mesure que le soleil montait dans le ciel, formant une chaîne aux cœurs rougeoyants, palpitants, en éveil. [...] Dans les montagnes, c'est au lever du soleil qu'il fait le plus froid ; tant que la peau demeure à l'ombre. »

 

Une description de Katmandou transporte le lecteur dans la capitale politique et religieuse du Népal, comme s’il y était :

 

« Abimée par les séismes à répétition, Katmandou était une ville épave, construite dans une cuvette dont le dôme de pollution, visible à des kilomètres à la ronde, emprisonnait ses habitants dans un marasme de poussière agitée par les vents qui descendaient des montagnes alentours pour y rester piégés et dont les flux servaient d'autoroutes aux particules en suspension rejetées par le trafic aérien et les nombreux fours à briques illégaux qui parsemaient la vallée. Aujourd'hui, l'une des villes la plus polluée au monde, sans pourtant posséder de véritable industrialisation. Capitale grouillante aux immeubles serrés les uns contre les autres dans une architecture anarchique et bancale, aux rues étroites et étouffantes dans lesquels s'entassaient plus d'un million d'habitants, pauvres pour la plupart. Katmandou faisait peur à vivre. »

 

On y découvre « Freak Street, cet ancien quartier hippie où, dans les années 60 et 70, les camés du monde entier venaient goûter au haschich local dans des boutiques dont la licence gouvernementale en autorisait le business. En vente légale donc, supervisée par l'État, les drogues dures avaient attiré en un temps record des jeunes occidentaux en vacances ou en rupture. Devenu le Disneyland de la came, des bus arrivaient directement de l'aéroport ou de la frontière indienne. L'État népalais s'était sèchement fait rappeler à l'ordre par le gouvernement américain, dirigé alors par Nixon dont la brigade des mœurs ne supportait pas de voir ses jeunes compatriotes aller se droguer ailleurs. Joli puritanisme hypocrite, à l'heure où la jeunesse réquisitionnée était massacrée dans la débâcle de la guerre du Vietnam. Le Népal, dépendant des nombreuses subventions américaines allouées à la santé ou l'agriculture, ne pouvait se permettre de mettre en péril les liens qui unissaient les deux pays. L'État avait donc affrété des charters dédiés à l'évacuation de ces hippies un peu spéciaux à la frontière indienne, sans que quiconque n’y trouve à redire. »

 

J’y ai découvert le rite de la cérémonie traditionnelle de la Puja :


« Au-delà du côté traditionnel de l'évènement dont les touristes étaient friands, cela restait avant tout un rituel sacré où les grimpeurs requéraient la bénédiction de la déesse Sagarmatha pour gravir l'Everest sans incident. [...] Des rangées de chaises pliantes avaient été installées face au stupa qui débordait d'offrandes et de plats. L'odeur douçâtre de bois de genévrier s'élevait en fumée au-dessus de l'assistance et se mêlait aux drapeaux de prières qui s'agitaient dans le vent, traçant leurs diagonales tendues sur le bleu du ciel qui recueillait les mantras inscrits à l'encre sur les tissus multicolores. » Je vous laisse lire la suite.

 

Les personnages principaux et secondaires de cette fiction sont très bien campés. Sur Babelio, un lecteur mentionne qu’une recherche sur Internet « permet de découvrir que le personnage haut en couleur de Lisbeth Crawley (Miss Crawley) est librement inspiré de la journaliste américaine Elizabeth Hawley qui a vraiment mis au point une base de données ‘’ The Himalayan database ‘’ citée dans le roman. D'autres protagonistes du roman ont vraisemblablement pour alter ego des personnages bien réels. » Ce qui apporte de la crédibilité au récit.

 

Le style fluide de l’auteure entraîne le lecteur en quête de découvrir l’explication du drame annoncé dès le premier de courts chapitres regroupés en deux parties.

 

Pour conclure, « Versant noir » est un thriller intéressant tant pour l’originalité du récit que pour son contenu pédagogique.

 

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Avec un master en art du spectacle de l’Université Paris-VIII-Vincennes-Saint-Denis, Lison Lambert a fait du théâtre et rêvait de devenir danseuse. Elle a enchaîné les petits boulots pour payer le loyer, tout en commençant à écrire du théâtre et des chansons.  Aujourd'hui elle se consacre à l'écriture de fictions. Dans une vidéo diffusée sur YouTube intitulée « Lison Lambert, ‘’ pépite ‘’ du festival Quai du polar » de Lyon, l’auteure explique sa démarche littéraire. 

 

Je tiens à remercier les éditions Hugo iMPACT pour l’envoi du service de presse.

 

Au Québec, vous pouvez commander votre exemplaire du livre via la plateforme leslibraires.ca et le récupérer dans une librairie indépendante.

 

 

Évaluation :

Pour comprendre les critères pris en compte, il est possible de se référer au menu du site [https://bit.ly/4gFMJHV], qui met l’accent sur les aspects clés du genre littéraire.

 

Intrigue et suspense :

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Originalité :

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Personnages :

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Ambiance et contexte :

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Rythme narratif :

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Cohérence de l'intrigue :

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Style d’écriture :

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Impact émotionnel :

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Développement de la thématique :

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Finale :

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Évaluation globale :

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