Fabien Nury / Sylvain Vallée / Delf. – Il était une fois en France. – Grenoble :
Glénat, 2020. – 374 pages.
Bande dessinée / Roman graphique
Résumé :
« Il
était une fois en France » raconte l'histoire de Joseph Joanovici, juif roumain devenu
l'homme le plus riche de France pendant l'occupation. Ferrailleur, collabo,
résistant, il fut pour certain un criminel, pour d'autres un héros. C'est le
cheminement de ce personnage ambigu baptisé le roi de Paris par ceux qui ont
croisé sa route, que relate cette saga au thème délicat. Monsieur Joseph se
confie sur son lit de mort aux côtés de Lucie-Fer, celle qui fut sa plus fidèle
compagne. Intelligence avec l'ennemi, corruption de fonctionnaires,
contrebande, enrichissement personnel et même meurtre seront reprochés à la
Libération à celui qui possédait pendant l'occupation un appartement en plein cœur
de la préfecture de police. Portant fièrement la rosette de la résistance,
Joseph reçoit les plus huppés du Tout-Paris, alors que de sombres nuages
annoncent la fin de son règne...
Commentaires :
Ce roman graphique est une œuvre magistrale qui
réunit dans une intégrale somptueuse (jaquette rigide, couverture de première à
l’image du personnage, reliure cousue, signet ficelle : un bel objet en
soi) les six tomes publiés séparément entre 2007 et 2012 :
1.
L'empire de monsieur Joseph
2.
Le vol noir des corbeaux
3.
Honneur et police
4.
Aux armes citoyens !
5.
Le petit juge de Melun
6.
La terre promise
On l’aura compris, « Il était une fois en France » est
un clin d’œil à « Il était une fois en Amérique » de Sergio Leone, « le parcours hors norme d’un gangster dans le
New York des années 1920 ». Certains critiques y voient également un lien
avec la série « Le
Parrain » ou des allusions à
« Il était une fois la révolution » et « Les Tontons flingueurs ».
Comment décrire cette œuvre magistrale toute
en couleurs sinon en soulignant quelques caractéristiques de ce projet colossal :
Sur le fond :
Un
scénario qui nous entraîne, dès les premières pages, dans de multiples scènes
brèves et retours dans le passé qui permettent d’insérer progressivement les
pièces d’un vaste puzzle historique.
Un
suspense continu jusqu’au dénouement tragique de la vie de ce ferrailleur qui,
gravissant peu à peu les échelons, devient, de malversation en malversation, un
criminel dont il a la carrure, craint de tous.
Une
galerie remarquable de personnages qui entourent Monsieur Joseph, comme
l’appellent autant ses amis que ses ennemis : Eva : née à Kichinev, son
épouse, Lucie Schmidt, surnommée Lucie-fer, son assistante et compagne, Robert Serge
Scaffa, jeune résistant assassiné par ses « camarades », dont Joanovici et le
juge Legentil, « ennemi juré » de ce dernier, qui le poursuit sans relâche.
Sans oublier des acteurs réels de l’occupation : le chef de la Gestapo Henri
Lafont,
le résistant Armand Fournet, membre de « Honneur et police » et Marcel Petiot, médecin crapuleux, un
des pires tueurs en série de la période de l’Occupation qui a fait l’objet d’un
film réalisé
par Christian de Chalonge, pour ne nommer que ceux-là.
Une
immersion dans une période noire de l’histoire de France avec comme décor la Seconde
Guerre mondiale, l’occupation allemande alors que des Français sympathisent
avec des Allemands et des nazis qui pratiquent le chantage pour s’enrichir. Pendant
que des résistants utilisent la manipulation et la trahison pour arriver à
leurs fins. La réalité se greffe à la fiction avec la mention de l'arrestation
des résistants au café Zimmer, de l’attentat
rue Lauriston, de l'exécution
des moines du couvent de la Brosse Montceaux, de la déportation ainsi que
du racisme et de l’antisémitisme des nazis.
Sans
oublier la Libération de Paris par le général de Gaulle et les conséquences
pour les « collabos ».
Sur la forme :
Un
scénario et un découpage cinématographiques de chaque portion du récit avec de très
nombreux gros plans de visages mis en valeur par un graphisme simple et
évocateur : les truands, les nazis, les collaborateurs ont des mines
patibulaires ; même les représentants de la justice ou de la police, malhonnêtes
ou pas, ont des allures de mafieux.
Quant
aux quelques personnages féminins, ils sont à la fois séduisants, parfois
sévères, sans verser dans la caricature.
Une
palette de couleurs à la fois chaudes et froides qui traduit l’ambiance parfois
inquiétante des intérieurs et des scènes de nuit.
De
nombreuses planches sans dialogues contribuent à accentuer l’intensité
dramatique.
J’ai consacré plusieurs heures pour
apprécier, de planche en planche, le travail impressionnant du trio de
créateurs de ce chef-d’œuvre du 9e art. J’y ai trouvé une autre
occasion de parfaire mes connaissances de cette période trouble de la France
occupée qui a laissé des traces indélébiles dans la mémoire des Français.
Je vous en recommande la lecture sans aucune
réserve.
Au Québec, vous pouvez commander votre
exemplaire sur le site leslibraires.ca et le récupérer
auprès de votre librairie indépendante.
Originalité/Choix du sujet : *****
Qualité littéraire et graphique : *****
Intrigue : *****
Psychologie des
personnages : *****
Intérêt/Émotion
ressentie : *****
Appréciation générale
: *****
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