Ariane Gélinas, Maureen Martineau, Corinne Jaquet et Michèle Pedinielli. – Noires saisons. – Lévis : Éditions Alire, 2024. – 253 pages.
Nouvelles noires
Résumé :
En 2021, Ariane Gélinas et Maureen Martineau
présentaient Criminelles, un recueil au fil duquel nous suivions, au gré du
calendrier lunaire, des femmes qui, instigatrices, complices ou témoins,
côtoyaient le monde sordide des affaires illicites.
Trois ans plus tard, c’est flanquées de deux
complices, les autrices Corinne Jaquet et Michèle Pedinielli – respectivement
suisse et française –, qu’elles nous offrent un nouvel aperçu du crime au
féminin. Et cette fois, les territoires visités sont encore plus vastes, du
Grand Nord québécois aux Alpes suisses, en passant par la Corse et
l’Isle-aux-Grues.
Aux femmes que nous croiserons dans Noires
Saisons s’ajoutera un « personnage » commun à tous les récits : le
réchauffement climatique et les bouleversements qu’il génère, été comme hiver,
automne comme printemps. Si parfois ce cinquième As facilitera les méfaits
commis, souvent il se transformera en Joker qui les dévoilera au grand jour,
bien des années plus tard, en faisant fondre les icebergs, monter les eaux et
éroder les rives.
Noires Saisons : douze nouvelles par quatre
écrivaines en parfaite maîtrise de leur plume… aussi noire que l’âme de leurs
protagonistes !
Commentaires :
J’ai beaucoup de difficulté à évaluer un
recueil de nouvelles, particulièrement lorsqu’elles sont écrites par différents
auteur.e.s. Certaines m’ont plus interpellée que d’autres.
Il est indéniable que chaque récit, limité à
15 à 20 pages et mettant en scène un nombre restreint de personnages,
comme c’est le cas dans une nouvelle, ne peut susciter une tension palpitante. Cependant,
l’originalité du récit, qui doit aborder un thème commun (dans notre cas, les
impacts du changement climatique et des infractions commises par des femmes),
peut contribuer à captiver le lecteur, créant ainsi une expérience de lecture
presque réaliste.
Comme l’expliquent les instigatrices du
projet « Noires saisons » (Ariane Gélinas et Maureen Martineau),
celui-ci fait suite à leur recueil de nouvelles « Criminelles », publié
en 2021, qui « mettait de l’avant des femmes coupables de méfaits divers […]
de la Gaspésie à la Baie-James ». En invitant « deux écrivaines européennes à rallier [leur]
rangs : Corinne Jaquet, de la Suisse
romande, et Michèle Pedinielli, du sud de la France », elles ont
« déployé une toponymie du crime en
des zones vastes et inédites ». Le fruit de cette collaboration est
une série de 12 intrigues criminelles, chacune accompagnée d’une mise en
évidence des conséquences des changements climatiques dans différents endroits
du Québec et du continent européen.
Autre particularité de cette première dans la
francophonie : « Ce projet réunit trois maisons d'édition, Alire (Québec), L'Aube noire (France) et Le Chien Jaune (Suisse), permettant à ce recueil de voyager
simultanément outre-mer ».
Les nouvelles de « Noires saisons »
sont réparties dans le désordre des saisons par groupe de trois textes,
ponctués par une notice biographique de l’une des auteures :
ÉTÉ
·
« La Vérité sur la Cuvette du Diable »
(Corinne Jaquet)
Une
secte, des restes humains refont surface à la suite de l’assèchement d’un lac,
en Suisse.
·
« À l'épreuve du feu » (Ariane
Gélinas)
Des
excursionnistes, des catacombes à ciel ouvert et des feux de forêt qui ravagent
au nord du Saguenay, au Québec.
·
« L'Eau qui dort » (Michèle
Pedinielli)
Un
promoteur qui veut bâtir un complexe de golf dans les Alpes-de-Haute-Provence,
alors que la canicule a commencé en juin (très d’actualité) et que l’eau se
fait rare.
PRINTEMPS
·
« Le Châtiment de l'eau » (Maureen
Martineau)
Des
averses torrentielles, de graves inondations et une découverte effroyable dans
un abri à Notre-Dame-du-Lac. [la nouvelle la plus sombre]
·
« Lignes de flottaison » (Ariane
Gélinas)
Un
trafic de stupéfiants qui dégénère dans la région de Blanc-Sablon, au Québec,
alors que des icebergs se détachent du Groenland en raison du réchauffement
climatique. [celle dans laquelle l’action est la plus intense]
·
« Ce qui est à naître » (Michèle
Pedinielli)
Une
autre affaire de drogue. De plus, des évènements bizarres se produisent dans un
cimetière corse, alors qu’un orage accompagné de grêlons éclate, obligeant deux
jeunes à se réfugier dans un caveau.
HIVER
·
« Jamais deux sans trois » (Corinne
Jaquet)
Des
avalanches causées par la fonte rapide des glaciers alpins, ainsi qu’un
touriste insupportable qui décède dans les eaux sulfureuses et riches en
magnésium.
·
« Rien n'est jamais fini » (Maureen
Martineau)
Des
fêtes de la Mi-Carême à l’Isle-aux-Grues, un mari infidèle, des berges rongées
par les marées d’automne et l’effondrement d’une route avec un décès suspect.
·
« Cette femme-là » (Michèle
Pedinielli)
Une
femme aux convictions religieuses profondes et à l’identité et au passé cachés
révèle avoir pratiqué des euthanasies. Une narratrice qui s’oppose à cette
pratique.
AUTOMNE
·
« Si la photo est bonne » (Corinne
Jaquet)
Un
orage se déchaîne sur le lac Léman, plusieurs bateaux font naufrage dans la
rade de Genève et des sauveteurs découvrent un corps dans un canot :
est-ce un accident ou un meurtre ? [ma préférée]
·
« Et rouillent les sentinelles »
(Ariane Gélinas)
Des
fouilles archéologiques dans la région de Schefferville, la pollution de
l’environnement (qualité de l’eau, santé des poissons) par l’exploitation
minière, une journaliste ensevelie sous un éboulement de terrain.
·
« La Tunique de Nessus » (Maureen
Martineau)
Dans
la chaleur accablante de la Haute-Mauricie, une vétérinaire découvre une
maladie contagieuse qui frappe divers animaux. Un photographe au processus
créatif douteux et une employée de pourvoirie animée par ses rêves les plus
fous. [j’ai bien aimé la finale imprévisible]
Chaque nouvelle est assez bien ficelée. Les styles distincts de chaque auteure se complètent harmonieusement.
* * * * *
Ariane Gélinas est originaire de Grandes-Piles. Directrice littéraire de la revue Le Sabord, elle est aussi directrice artistique, coéditrice et codirectrice littéraire du magazine Brins d’éternité. Chargée de cours à l’UQTR, elle y détient également un doctorat portant sur « Les Mémoires du diable » de Frédéric Soulié. En plus d’avoir publié une soixante-dizaine de nouvelles dans plusieurs périodiques, elle est l’auteure de six ouvrages dont « L’Enfant sans visage » (XYZ), la trilogie « Les Villages assoupis » (prix Arts Excellence, Jacques-Brossard et Aurora/Boréal) publiée au Marchand de feuilles et le recueil « LeSabbat des éphémères (Les Six brumes) ». Ses romans « Les Cendres de Sedna » (prix Arts Excellence et Aurora/Boréal) et « Quelques battements d'ailes avant la nuit » sont parus respectivement en 2016 et en 2019 chez Alire. Elle demeure à Trois-Rivières depuis plusieurs années.
Corinne Jaquet écrit depuis plus de trente ans des ouvrages sur l'histoire criminelle de Genève, sa ville natale. Elle est aussi l'auteure d'une douzaine de romans policiers, de nouvelles policières et d'ouvrages pour la jeunesse, dont plusieurs sont issus d'ateliers d'écriture avec des classes de collégiens. Retrouvant la plume de chroniqueuse judiciaire qu'elle tenait pour le journal La Suisse dans les années 1980 et 1990, elle a créé en 2022 une collection consacrée aux faits divers suisses, dont deux volumes sont déjà parus aux éditions du Chien Jaune.
Née en avril 1968, Michèle Pedinielli fait sa première manifestation à
un mois et termine son premier roman quarante-huit ans plus tard. Entre-temps,
la routine: fuir Nice à dix-huit ans, devenir journaliste à Paris, revenir
vingt-deux ans plus tard au bercail, choisir de ne plus avoir de patron,
pointer au chômage, voir sa nouvelle récompensée au festival Toulouse Polars du
Sud en 2015. Et décider d'écrire un roman pour ne pas mourir sans avoir essayé.
« Boccanera » sort
en février 2018 aux éditions de L'Aube, suivi d' « Après les chiens »
(2019), « La Patience de l'immortelle »
(2021) et « Sans collier »
(2023). Quatre volets qui suivent la détective Ghjulia Boccanera, dite Diou,
détective privée quinquagénaire enquêtant dans Nice et sa région ainsi qu'en
Corse.
Je tiens à remercier les éditions Alire pour l’envoi du
service de presse.
Au Québec, vous pouvez commander votre
exemplaire du livre via la plateforme leslibraires.ca et le récupérer dans
une librairie indépendante.
Merci à vous pour ce résumé et cette mise en avant de Noires Saisons. Présent sur les trois marché, cet ouvrage permet de découvrir quatre styles d'écriture bien différents.
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