Fatal (Johanne Seymour)


Johanne Seymour. – Fatal. – Montréal : Libre expression, 2025. – 319 pages.

 

 

Thriller psychologique

 

 

 

Résumé :

 

Responsable des événements spéciaux dans un grand magasin montréalais, Camille Ladouceur a une vie sociale animée, mais une vie privée... drabe ! Elle a cependant de bonnes raisons de préférer son quotidien sans histoires. Camille porte en elle le souvenir angoissant d'un passé qu'elle voudrait enterrer à tout jamais : celui de sa passion toxique avec un pervers narcissique.

 

Un soir, ghostée par la date que ses amies lui ont dénichée contre son gré, elle noie son amertume au bar d'un bistro, charmant son voisin de comptoir avec son discours absurde sur l'amour. Puis Camille, avec un baiser volé et une fuite digne de Cendrillon, crée à son insu une fissure dans son propre cœur fortifié. Et, comme elle le craint depuis vingt ans, son cauchemar recommence.

 

Un jour, en rentrant du travail, Camille a la vive impression qu'on la suit. Débute alors une danse entre le réel et l'imaginaire...

 

 

Commentaires :

 

À la lecture de « Fatal », je n’ai pu m’empêcher d’établir une comparaison avec « Fracture », le précédent roman de Johanne Seymour publié en 2024, que j’avais bien aimé. Tant par la structure du scénario que par la thématique de dénonciation des travers humains. À la fois des thrillers psychologiques et des polars puisqu’ils intègrent une enquête policière mettant en scène les mêmes policiers : la sergente-détective Kim Tran et le sergent Daniel Jasmin œuvrant aux Affaires non résolues du Service de police de la ville de Montréal (SPVM).

 

 

Dans « Fracture », trois hommes, Samuel, Steve et Patrick, des amis d’enfance dans la quarantaine, revivent un épisode douloureux de leur jeunesse, victimes des abus sexuels qu’ils ont subi de la part de leur entraîneur de baseball. Ils sont confrontés à un pacte de silence sur leur passé et à la mort « accidentelle » de leur agresseur.

 

Dans « Fatal », trois femmes en quête d’amour dont l’une d’entre elles, Camille, qui a subi vingt ans auparavant les agressions d’un pervers narcissique, Luc Dupré (alias Michel Guay), soupçonné d’avoir poussé sa première femme au suicide et assassiné sa deuxième. Et Amélie qui, à la recherche d’un prince charmant, tombe sous le charme de ce dernier qui refait surface pour assouvir sa vengeance.

 

J’ai retenu cet extrait qui résume bien l’amorce de ce récit :

 

« Le couple [...] c’est quelque chose que tu veux quand tu l’as pas... Et quelque chose que tu te demandes pourquoi tu l’as voulu quand tu l’as. Ajoute un bébé au mélange... pis tu t’comprends vraiment pus. »

 

L’histoire se déroule principalement à Montréal dans le Mile-End et le centre-ville ainsi qu’à Québec (rue Bourlamaque et un club privé) avec des allers-retours entre 2005 et les années 2025-2026. Milieu de travail délétère, féminicides, violence conjugale, sites de rencontres pour dénicher la perle rare, terrain de prédilection de prédateurs charmeurs, réseaux sociaux toxiques... sont au rendez-vous.

 

« Fatal » est un roman dont la tension croît tout au long des 66 courts chapitres qui mettent progressivement en lumière le drame vécu en 2005 et ses conséquences : un syndrome de stress post-traumatique de la victime qui doit se créer une nouvelle identité pour fuir le pervers narcissique qui avait pris le contrôle de sa vie.

 

Le style de l’auteure est direct, sans fioritures. L’économie de descriptions des lieux, de situations et de caractéristiques physiques des différents personnages principaux et secondaires tout en mettant l’accent sur le profil psychologique des protagonistes contribue à alimenter le rythme du récit. J’ai tout de même noté deux extraits qui, en quelques mots, sont très imagés :

 

« Kim se gratta les avant-bras, habitude qu’elle avait quand quelque chose ne tournait pas rond dans un dossier. »

 

« Dans le bureau, le silence était lourd comme un dix-roues enfoncé dans la boue. »

 

La concentration de l’action sur à peine plus de 300 pages fait en sorte que certains constats (la sortie du coma de la mère de Camille, la réconciliation de Hugues et Juliette, l’effet « limité » du fentanyl, la valise laissée par Dupré dans la chambre du motel...) sont tout de même acceptables.

 

De plus, le fait que l’auteure cite en référence le « Manuel diagnostique des troubles mentaux (également désigné par le signe DSM, une abréviation de l’anglais) ... un ouvrage de référence publié par l’Association américaine de psychiatrie décrivant et classifiant les troubles mentaux ») démontre que sa fiction repose sur une documentation scientifique.

 

« Fatal » traite d’une réalité très contemporaine qui se concrétise, depuis quelques années, par la mise en lumière de cas documentés et dans des poursuites en justice de plus en plus nombreuses dont certaines sont très médiatisées. Vous pouvez écouter Johanne Seymour parler de son thriller au Cochaux Show, l'émission composée d'entrevues et de chroniques qui traite de l'actualité littéraire : un roman pour un lectorat tous genres confondus.



 

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Johanne Seymour est comédienne, scénariste, réalisatrice et romancière.

 

« Le Cri du cerf », son premier roman, est publié en 2005 et Kate McDougall, sa détective fétiche, conquit aussitôt les lecteurs. « Eaux fortes », paru en 2012 est le cinquième et dernier volet des enquêtes McDougall. Les romans de cette série ont été, tour à tour, finalistes au Prix de la relève Archambault, au Grand Prix Archambault, au prix Saint-Pacôme ainsi qu'au prix Arthur Ellis.

 

Outre la série des enquêtes McDougall, Johanne Seymour a écrit « Wildwood », un roman d'apprentissage sur fond noir remarqué par la critique, ainsi que « Rinzen et l'homme perdu », finaliste au prix Arthur Ellis 2017 du meilleur roman policier de langue française. « Rinzen, la beauté intérieure », le deuxième opus de la série Gyatso, paru à l'automne 2018, a été finaliste au prix Arthur Ellis 2019 ainsi qu'au prix Saint-Pacôme 2019 du meilleur roman policier.

 

Johanne Seymour est également la fondatrice du festival international de littérature policière Les Printemps meurtriers de Knowlton (2012-2016).

 

 

Je tiens à remercier les éditions Libre expression pour l’envoi du service de presse.

 

Au Québec, vous pouvez commander votre exemplaire du livre via la plateforme leslibraires.ca et le récupérer dans une librairie indépendante.

 

 

Évaluation :

Pour comprendre les critères pris en compte, il est possible de se référer au menu du site [https://bit.ly/4gFMJHV], qui met l’accent sur les aspects clés du genre littéraire.

 

Intrigue et suspense :

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Originalité :

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Personnages :

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Ambiance et contexte :

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Rythme narratif :

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Cohérence de l'intrigue :

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Style d’écriture :

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Impact émotionnel :

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Développement de la thématique :

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Finale :

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Évaluation globale :

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9.5

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Yves Apache Trudeau (Julian Sher et Lisa Fitterman)

Julian Sher et Lisa Fitterman. – Yves Apache Trudeau. – Montréal : Éditions de l’Homme, 2025. – 309 pages..

 

 

Documentaire criminel (True Crime)

 

 

 

Résumé :

 

Tueur à gages pour le compte des Hells Angels dans les années 1970 et 1980, Yves Trudeau demeure l'un des meurtriers les plus prolifiques du Canada. Après avoir échappé de justesse à la mort, il devient informateur pour le gouvernement et confesse ses crimes, notamment l'exécution de 43 personnes. Ses performances en tant que témoin se révèlent toutefois désastreuses et le temps de détention minimal dont il écope suscite l'indignation de la population. Les auteurs à succès Julian Sher et Lisa Fitterman racontent l'incroyable histoire de cet assassin qui a échappé à la police et à la justice pendant plus d'une décennie.

 

 

Commentaires :

 

En début d’avis de lecture, j’ai le goût de paraphraser un slogan popularisé par la Société des alcools du Québec (SAQ) puis repris par l'organisme Éduc'alcool prônant la modération : la fiction « a bien meilleur goût ». Autrement dit, j’ai davantage de plaisir à lire un polar, un roman noir ou un thriller qu’un documentaire sur le même thème.

 

C’est aussi le constat que je fais de la publication de Julian Sher et Lisa Fitterman qui raconte « L’histoire du Hells Angels le plus meurtrier du Canada ». Isabelle Richer, journaliste et chroniqueuse judiciaire, résume bien en préface le propos de cet ouvrage « fouillé, regorgeant de faits précis et méconnus » et très documenté avec ses 160 références bibliographiques :

 

« Le récit palpitant des auteurs nous plonge dans l'histoire d'un personnage aussi odieux que célèbre, inextricablement lié à des événements qui ont laissé des cicatrices sur la population québécoise.

 

Yves Apache Trudeau explore la naissance et le fonctionnement impitoyable d'une organisation qui n'a de loi que la sienne.

 

Julian Sher et Lisa Fitterman nous entraînent sur [...] des sentiers qui nous conduisent à travers des décennies de crimes et de lutte à la criminalité, ce jeu de chat et de souris que se livrent policiers et bandits. »

 

En page préliminaire, les auteurs ont regroupé dans un tableau les différents protagonistes : le tueur à gages lui-même, les Hells Angels de Californie, de Sorel et de Laval, les Nomads, les associés des motards, le Gang de l’ouest, la police de Montréal, les procureurs, les avocats de la défense et les journalistes.

 

Dans une première partie intitulée « Tuer, c’était une nécessité » les 43 assassinats commis par Yves Trudeau sont décrits – souvent avec redondance, l’imagination criminelle ayant ses limites – dans huit chapitres illustrant la folie meurtrière dans une ville de Montréal aux prises avec la  montée des groupes de motards criminels et l’impuissance des forces policières à les contrôler. Le tout bien mis en évidence par un tabloïd policier très populaire publié de 1953 à 2003, spécialisé dans la couverture de faits divers : Allô Police qui « n’a jamais rechigné à faire la part belle aux scènes de crimes les plus obscènes qui soient » avec photographies ainsi que d'autres sujets reliés au monde de la justice et des mœurs.

 

L’origine des Hells Angels « dont le nom du groupe est emprunté à celui d’un escadron de pilotes de bombardiers américains qui étaient postés en Angleterre pendant la Seconde Guerre mondiale » nous est relatée. Leur expansion en Amérique et sur la scène internationale reposant sur un « mouvement de contre-culture qui a fait d'eux des héros anti-establishment aux yeux de bien des gens et, plus important encore, une explosion de la consommation de drogues récréatives - la marijuana, l'héroïne, l'acide et, par-dessus tout, la cocaïne ».

 

On y trouve également une référence aux frères Blass (Michel et Richard) dont ce dernier a fait l’objet d’une BD (« Blass - Le chat sur un toit brûlant ») scénarisée par le Québécois Michel Viau.

 

Chaque personnage – tueur, tué, motard, conjointe de motard, policier, avocat... – nous est décrit physiquement en une courte phrase fort éloquente, comme dans cet exemple :

 

« Homme de petite taille aux traits acérés, avec des lèvres minces qui semblaient figées dans un air renfrogné, Ross avait reçu le surnom peu flatteur de ‘’ Belette ‘’. L'explication la plus charitable consistait à croire qu'avec ses yeux de fouine et son nez crochu, il ressemblait un peu à un furet.

 

La deuxième partie intitulée « Ils veulent me tuer » raconte pourquoi et comment Yves Trudeau est devenu informateur pour la Sûreté du Québec. Quant au troisième bloc de chapitres (« Je vois ça comme une punition »), il porte sur les différents procès et le sort réservé par la justice à chaque incriminé ayant collaboré ou non avec la justice lors de leurs procès.

 

Un encart de huit pages reproduit des photos, un peu à la manière du journal Allô Police qui permet de mettre des visages sur les « nominés », dont les 43 assassinés par Yves Trudeau pour lesquels je vous suggère de vous doter d’une loupe pour consulter le texte qui les accompagne.

 

En épilogue, Julian Sher et Lisa Fitterman font le bilan des interventions policières réalisées depuis 2009 ainsi que des autres événements liés à la poursuite des guerres entre motards. Pour conclure qu’un « autre Yves (Apache) Trudeau se trouve peut-être déjà quelque part, au hasard des ruelles et des bars, en train de fourbir ses armes, alors que la lutte pour le pouvoir s’intensifie une fois de plus dans le monde québécois de la criminalité. »

 

Un index des noms de personne, de groupes criminalisés et de lieux et une liste de lectures suggérées complètent ce texte qui comporte un certain nombre de redites.

 

Les amateurs de ce gendre d’ouvrages verront certainement leurs attentes comblées en parcourant la vie de ce tueur à gages qui, en se transformant en délateur, s’en est tiré au début des années 1990 avec une peine réduite à sept ans d’emprisonnement.

 

Doté d’une nouvelle identité, il vit alors sous le nom de Denis Côté, travaillant « comme aide-soignant dans une maison de soins infirmiers. Cependant, après avoir été renvoyé de son travail en 2000, il est de nouveau arrêté en 2004 pour plusieurs agressions sexuelles (dont une sur un garçon de 13 ans), qui lui vaudront 4 ans de prison. Il est décédé d'un cancer en 2008 à l'âge de 62 ans.» [Wikipédia].

 

« Yves Apache Trudeau » est la version anglaise de « Hitman - The Untold Story of Canada’s Deadliest Assassin » publié en 2025 par HarperCollins Publisher.

 

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Julian Sher est auteur, cinéaste et journaliste d'enquête de renom. Il a reçu plusieurs prix, dont celui de la Canadian Authors Association pour son historique du Ku Klux Klan au Canada. Il a écrit dans plusieurs journaux, notamment The Globe and Mail, The Ottawa Citizen et La Presse, ainsi que pour CNN.com.


Lisa Fitterman est journaliste, rédactrice et chroniqueuse. Elle a notamment couvert la guerre des motards au Québec et les affaires judiciaires pour le Montreal Gazette. Son travail a été publié dans de nombreux journaux et magazines partout au pays.

 

 

Je tiens à remercier les Éditions de l’Homme pour l’envoi du service de presse.

 

Au Québec, vous pouvez commander votre exemplaire du livre via la plateforme leslibraires.ca et le récupérer dans une librairie indépendante.

 

 

Évaluation :

Pour comprendre les critères pris en compte, il est possible de se référer au menu du site [https://bit.ly/4gFMJHV], qui met l’accent sur les aspects clés du genre littéraire.

 

 

Impact émotionnel :

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