Requiem américain (Jacques Côté)


Jacques Côté. – Requiem américain. – Montréal : Flammarion Québec, 2023. – 318 pages.

 


Polar

 

 


Résumé :

 

Montréal, au cœur des années 1990. Fraîchement sorti de prison, Marc Hamel, tête dirigeante des Hells Angels, commande un assaut en règle contre les Rock Machine. L’enjeu : étendre son territoire et contrôler le marché de la drogue. L’affrontement des clans ennemis plonge la métropole dans la confusion et le chaos. Les fusillades s’enchaînent, les bombes explosent et les cadavres se multiplient. Afin d’enrayer cette escalade de la violence, Owen Hayden et son équipe du SPCUM doivent frapper vite et fort. Or, pour le lieutenant responsable de l’escouade antigang, la guerre des motards a un visage très intime. Son frère Tom est le bras droit de Marc Hamel. Comment l’aîné, qui s’est rangé du côté de la loi, parviendra-t-il à mater des adversaires aussi féroces, à commencer par ce « Tomgun » Hayden dont il partage le sang ?

 

 

Commentaires :

 

« Ce roman est une interprétation très libre de la guerre des motards qui a eu lieu au milieu des années 1990 au Québec. Celles et ceux qui voudront s'amuser à examiner à la loupe les liens directs et chronologiques avec les événements réels feront fausse route. Tout a été déformé intentionnellement pour les besoins de la fiction. Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé ne serait que pure coïncidence. »

 

Jacques Côté qui, après cinq ans, replonge dans la création romanesque pour notre grand plaisir, a beau lancer cet avertissement d’usage en page liminaire de Requiem américain, toutes celles et tous ceux qui ont vécu à l’époque des événements qui y sont décrits risquent de ne pas faire « fausse route ». Si ce n’est que ce récit est concentré sur une ligne du temps d'à peine 39 jours et qu’il cumule un enchaînement essoufflant d’événements ayant fait la manchette des médias québécois, canadiens et même américains pendant plusieurs mois à partir du milieu des années 1990. Incluant la convocation et la tenue d'une commission parlementaire ! Mettant en scène les principales têtes d’affiche des groupes de motards criminels, de la pègre et de la mafia italienne de Montréal ainsi que de certains politiciens véreux. Dans un climat de guerre de clans à finir qui s’est même transportée dans la capitale nationale.

 

Voilà pour le décor.

 

Mais Requiem américain, c’est aussi l’occasion que le genre littéraire « polardien » offre pour, comme ici, jeter la lumière sur des antagonismes quasi irréconciliables :

 

·        deux frères aux parcours divergents : Owen, le lieutenant incorruptible et Tom, le criminel notoire et influent ;

·        deux groupes criminalisés prêts à tout pour occuper le marché des produits de la drogue et de la prostitution : les Hells Angels et les Rock Machine, sans oublier leurs clubs-écoles ;

·        la rivalité légendaire entre deux corps policiers qui se marchent sur les pieds en cours d’investigation : le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal (SPCUM) et la Sûreté du Québec (SQ) ;

·        les relations tendues, parfois à couteau tiré, entre les enquêteurs et les médias ;

·        les inconforts entre les forces de l’ordre et le milieu politique ;

·        le climat du respect des compétences des deux niveaux de gouvernement du Québec et du Canada ;

·        l’incommunicabilité Owen Hayden et Annick, son ex-épouse.

 

Tous les ingrédients d’une recette qui dynamise cette fiction tourne-page jusqu’à la finale inattendue, précurseure d’une suite à venir.

 

Dès les premiers courts chapitres rédigés de main de maître – l’auteur est professeur de littérature il va sans dire –, nous sommes entraînés dans les différents quartiers de la métropole et de la couronne sud que l’auteur a dû lui-même parcourir en cours de recherche et d’écriture. Les descriptions des lieux et des protagonistes sont autant de repères visuels très crédibles. Certaines scènes rocambolesques, comme celle à la salle à manger du Ritz Carlton et à la sortie du stationnement de l'hôtel pour ne nommer que celle-là, sont jubilatoires. Et, comme dans plusieurs autres romans policiers, le quartier général des enquêtes spécialisées de place Versailles, dans l’est de Montréal, est la plaque tournante de la concertation et de la planification des opérations policières.

 

Requiem américain peut aussi être qualifié à sa manière de polar historique avec également ses allusions au référendum de 1995, les affinités entre un certain ministre du Travail et la pègre montréalaise, le scandale des commandites qui pointe, voire à la raison d’être de la future Commission Charbonneau sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction. Aussi par l’importante recherche préalable dans les sources de l’époque.

 

Jacques Côté nous offre aussi une palette de personnages colorés et bien campés tant du côté des forces de l’ordre que des criminels. Les dialogues sont des plus réalistes. Ce roman se lit également en s’offrant de courtes pauses pour visionner et écouter sur YouTube les nombreuses références musicales parsemées dans les 36 chapitres qui – je comprends que l’action se déroule dans les années 1990 – ne sont malheureusement  que des pièces anglophones.

 

En résumé, l’année 2023 débute sur les chapeaux de roues de Harleys. Il semble qu’il faudra attendre l’an prochain pour la suite des choses. Et qui sait, une adaptation cinématographique !

 

Merci aux éditions Flammarion Québec pour le service de presse.

 

 

Originalité/Choix du sujet : *****


Qualité littéraire : *****

Intrigue :  *****

Psychologie des personnages :  *****

Intérêt/Émotion ressentie :  *****

Appréciation générale : *****