À la ligne – Feuillets d’usine (Joseph Ponthus)


Joseph Ponthus. – À la ligne – Feuillets d’usine. – Paris : La Table ronde, 2019. – 262 pages.



Premier roman







Résumé :

C'est l'histoire d'un ouvrier intérimaire qui embauche dans les conserveries de poissons et les abattoirs bretons. Jour après jour, il inventorie avec une infinie précision les gestes du travail à la ligne, le bruit, la fatigue, les rêves confisqués dans la répétition de rituels épuisants, la souffrance du corps. Ce qui le sauve, c'est qu'il a eu une autre vie. Il connaît les auteurs latins, il a vibré avec Dumas, il sait les poèmes d'Apollinaire et les chansons de Trenet. C'est sa victoire provisoire contre tout ce qui fait mal, tout ce qui aliène. Et, en allant à la ligne, on trouvera dans les blancs du texte la femme aimée, le bonheur dominical, le chien Pok Pok, l'odeur de la mer.

Par la magie d'une écriture tour à tour distanciée, coléreuse, drôle, fraternelle, la vie ouvrière devient une odyssée où Ulysse combat des carcasses de bœufs et des tonnes de boulots comme autant de cyclopes.


Commentaires :

À la ligne est le premier roman de Joseph Ponthus originaire de Reims. Wikipédia nous apprend que l’auteur a travaillé à la mairie de Nanterre comme éducateur spécialisé puis a suivi et aidé des jeunes en difficulté. En 2015, un mariage le conduit en Bretagne, à Lorient. Ne trouvant pas de travail dans la continuité de son activité en région parisienne, il s’inscrit dans une agence d’intérim. Cette société lui propose des postes successifs comme ouvrier. Tout d’abord dans une conserverie de poissons, où il passe de la ligne des poissons frais, à celle des poissons panés, puis à l’égouttage des tofus et enfin à la cuisson des bulots. Son emploi suivant est dans un abattoir.

Ce sont ses deux expériences d’ouvriers d’usine que Joseph Ponthus nous relate dans une autofiction coup de poing, un livre remarquable.

D’abord par son style littéraire, déroutant en début de lecture, mais tout à fait adapté à la thématique : à la ligne, sans points ni virgules. Un long poème, une ode aux ouvriers qui peinent au quotidien dans un travail à la chaîne dévalorisant, dévalorisé, travail ignoré des consommateurs qui profite du produit de leur labeur.

Et par les questions de société qu’il soulève.  Ambiance, odeurs, descriptions souvent déstabilisantes, réflexions de l’ « homme-machine » sur la monotonie des heures passées à l’usine, les cadences infernales, le travail déshumanisant, la surexploitation des ressources et des humains, l’épuisement physique, les courtes nuits de sommeil, les relations de travail malsaines, le ridicule de certaines tâches… l’apanage de ce roman social hors normes.

Une œuvre romanesque remarquable qui choque, qui dérange, qui révolte, qui laisse en bouche le goût des produits alimentaires usinés. Un livre que j’ai dévoré en quelques heures et qui mérite bien le Grand prix RTL-Lire, le Prix Régine-Deforges, le Prix Jean-Amila-Meckert, le Prix du premier roman par les lecteurs des bibliothèques de la Ville de Paris et le Prix Eugène-Dabit du roman populiste reçus au moment de la publication de cet avis de lecture.

Une de mes lectures coup de cœur 2020.


Originalité/Choix du sujet :
*****
Qualité littéraire :
*****
Intrigue :
*****
Psychologie des personnages :
*****
Intérêt/Émotion ressentie :
*****
Appréciation générale :
*****